Portrait d’un valeureux adversaire – 2 Avril 1915 – 1/2 – RENE CHAMBE, un écrivain en général

René Chambe a collé au verso de cette aquarelle (signée « Trilay » ?) un étonnant commentaire, à l’image de ce dessin :
« Ceci est un document vraiment extraordinaire. Je m’étais souvent demandé ce qu’était devenu l’équipage allemand que nous avions descendu, Pelletier-Doisy et moi, le 2 avril 1915 (pilote von Keussler, observateur oberleutnant Bobruggle) [photo plus bas, les deux aviateurs allemands sortant de l’interrogatoire dans la Ferme d’Alger, à Vaudemange, sud de Reims] et s’il avait été bien traité dans le camp de prisonniers où tous deux avaient été transférés ? Nous souhaitions qu’ils eussent été traités convenablement, comme il sied à de valeureux combattants. Mais jamais plus nous n’avions eu de leurs nouvelles ni pendant la guerre (1914-1918), ni après la guerre. Qu’étaient-ils devenus ? Mystère…

   Or voici que cinquante-trois années plus tard (!!!), le 8 mai 1968, un habitant de Limoges m’a remis cette aquarelle exécutée par un amateur, sans doute surveillant dans un camp de prisonniers de l’époque ! Sa signature est peu visible. Sous doute Tarlay ?
   C’est le portrait du pilote allemand, le fahnrich (aspirant) von Keussler ! Cette aquarelle porte, encore très visibles et rédigées au crayon, les inscriptions suivantes :
Recto : Descendu par Pelletier-Doisy et Lnt Chambe   .
   von Keussler.   Aviateur P.G.
   13e Escadrille   Albatros
Verso : Touché près de Chalon par Pelletier-Doisy   observateur Lieutenant Chambe. Dragon.
   Comment cet habitant de Limoges, encore jeune, 45 ans, était-il détenteur de cette aquarelle ? Il n’a pas su me le dire. Elle était dans sa famille sans qu’il sût comment elle y était venue. Ayant lu Au temps des carabines [Flammarion, 1955. Ndlr], il s’était fait un devoir de me l’offrir.
   Je dois dire que cela m’a fait le plus vif plaisir. Après tant d’années, plus d’un demi-siècle, j’avais enfin des nouvelles… rétrospectives de l’un des deux membres de notre équipage allemand et de manière – très humaine – dont il avait été traité. Depuis qu’est-il devenu ?…
Le Repaire 8 mai 1968
René Chambe »